« Qu'y a-t-il de pire qu'un pianiste ? Deux pianistes », ironise ève Risser dans les notes de la pochette. Davantage intéressées par les sonorités de l'instrument que des instrumentistes en tant que tels, c'est dans cette direction qu'elles ont orienté le propos de cette oeuvre à quatre mains. Car To Pianos ne se résume pas à la réunion de deux pianistes virtuoses, il va bien au-delà, et c'est ce qui transparaît tout au long du disque : d'infinies possibilités en terme de sonorités, d'ambiances, d'atmosphères, qui, une fois diluées dans un espace physique, échappent à leurs créatrices qui se plaisent à jouer avec ce qu'il en ressort. Reste que dans ce champ d'expérimentation, une musicalité toujours demeure.Comme dans une course démarrée à toute allure, côte à côte, les deux pianistes se dépassent, s'attendent, se surprennent, s'amusent. Marquant des pauses, elles vont progressivement puiser dans ce que l'âme peut receler de lumière et de noirceur. Comme dans toute rencontre, rien n'est tranquille bien longtemps et la légèreté fait parfois place à une certaine gravité. Mais quel que soit le mouvement, chacune retombe à chaque fois sur ses pieds, sur la corde sensible d'un Steinway, et retrouve l'autre.Des résonances sorties des entrailles d'un piano, à l'aide d'objets qu'elles intercalent sur les cordes, une réinterprétation libre suivi d'une mélodie prenante qui s'installe soudain, le répertoire est vaste : un titre de Kaja Draksler, deux d'ève Risser, un de Carla Bley et quatre improvisations. Il sera difficile à ceux qui en raffolent de cataloguer une oeuvre comme celle-ci. Parce qu'il s'agit tout simplement de musique, rendue possible par la rencontre nécessaire, car ô combien fertile, de deux grandes artistes.